BEASTARS

Laisse tomber, ça ne sert à rien de lutter... Toi comme moi, on est des carnis...

Bill

Beastars © Akita Shoten 2016-2020/ Ki-oon 2016-2022 Tous droits réservés.

Genre :
Shônen
Auteure :
ITAGAKI Paru
Tomes :
22 (Terminé)
Magazine de prépublication :
Weekly Shônen Champions (2016 > 2020)
Éditeur français :
Ki-oon (2016)

À l'institut Cherryton, herbivores et carnivores vivent en harmonie.
Mais un beau jour, un drame a lieu. Le corps sans vie de Tem, un alpaga, est retrouvé, provoquant un retour des méfiances envers les carnivores. Tous les soupçons se portent naturellement sur Legoshi, un loup gris timide, en raison de sa proximité avec l'alpaga. Mais Legoshi est innocent et se mettra alors en quête du meurtrier.

Et c'est dans ce contexte particulièrement tendu que les élections du Beastar approchent, celui qui deviendra le leader des animaux capable de ramener la paix. Le favori étant Louis, un cerf membre du club de théâtre dans lequel se trouvait Tem mais aussi Legoshi…

Rencontre entre le prédateur et la proie

Difficile de présenter BEASTARS en quelques mots. Le synopsis de départ nous fait découvrir un monde antropomorphe où herbivores et carnivores vivent en harmonie, juqu'au jour où un meurtre a lieu à l'institut Cherryton. En effet, Tem, un alpaga, est retrouvé mort, provoquant suspicion et de méfiance envers les étudiants carnivores. Les soupçons se portent alors sur Legoshi, un loup gris, membre du même club de théâtre que Tem. Tout cela arrive en même temps que les élections du futur Beastar, donnant donc l'avantage à Louis, le candidat herbivore. Ainsi si l'on pense d'abord mener une enquête tout en suivant les élections du Beastar, l'œuvre va cependant rapidement changer de sujet en se focalisant sur la rencontre entre le loup Legoshi et la lapine Haru.

Beastars © Akita Shoten 2016-2020/ Ki-oon 2016-2022/ Duotaku no Sora 2024 Tous droits réservés.

Et c'est cette rencontre qui va être au cœur des premiers tomes puisqu'à travers son rapprochement avec Haru, Legoshi va comprendre que tous les animaux ne sont pas égaux. Coincée dans sa vision étriquée, Legoshi va alors découvrir les injustices que subissent les herbivores mais aussi le danger qu'ils peuvent encourir en raison de leur petite taille ou plus simplement de leur espèce naturellement appétissante pour un carnivore. C'est donc toute une société similaire à la nôtre que va chercher à nous exposer BEASTARS, en montrant que malgré son apparente harmonie, se cachent aussi des zones d'ombres tel le Marché Noir où il est possible pour les carnivores de se rassasier en viande malgré l'interdit. Un premier arc donc qui cherchera à présenter un monde globalement similaire à celui des humains tout en y incorporant une relation romantique (très) inhabituelle – pour ne pas dire mal vue – au vu de la dangerosité de celle-ci pour l'herbivore. Bien sûr à cela viendra s'ajouter l'affaire du meurtre de Tem dont les éléments se rejoindront petit à petit pour finalement dévoiler tous les secrets des élèves dans la fin de ce premier arc qui aurait pu faire office de conclusion au manga.

Mais arrive finalement le deuxième arc qui lui sera radicalement différent. En effet la deuxième partie de l'intrigue nous fera quitter l'institut Cherryton pour mettre l'accent sur la vie en société. Une bonne chose qui permet d'aborder de nouveaux sujets plus terre-à-terre mais qui en contrepartie fera aussi perdre énormément de charme à l'œuvre ! En effet, de nombreuses intrigues (notamment la relation Legoshi-Haru) se verront mises de côté. L'histoire quant à elle aura tendance à stagner et à s'étioler pour mettre l'accent sur les divers affrontements de Legoshi pour au final ne jamais vraiment décoller et aboutir à une fin précipitée.

Le manga se construit donc en deux temps, à savoir une première partie bien ficelée présentant bon nombre de personnages, ainsi qu'un univers intéressant qui vient s'enrichir de thématiques sérieuses, associées à un aspect thriller qui se conclut dans un final explosif. Et une deuxième partie à l'opposée de la première, avec quelques nouveaux personnages mais bien moins marquants, des thématiques certes toujours intéressantes mais plombées par un nouvel antagoniste qui peine à véritablement agir, et surtout d'énormes soucis de rythme qui font piétiner l'histoire pour aboutir à une conclusion des plus classique.

"Au fond de nous, nous ne sommes que des animaux."

Ainsi nous allons rencontrer énormément de personnages au cours de l'œuvre, à commencer par Legoshi, ce grand loup gris qui suite au meurtre de Tem attirera bien des regards au vu de sa nature de carnivore. Et pourtant Legoshi, malgré sa carrure impressionnante, n'en est pas moins d'une nature profondément gentille. Et au fil de son enquête, il commencera à en apprendre de plus en plus sur les herbivores, allant même jusqu'à tomber sous le charme de l'un d'eux ! Très naïf sur le monde également, il cherchera toujours à refouler ses instincts de prédateur et à protéger les herbivores. Legoshi est un personnage qui évoluera énormément au cours de l'histoire. De nature à ne pas attirer l'attention, il finira finalement par devenir quelqu'un à qui l'on peut accorder sa confiance tout en restant toujours très humble sans jamais chercher à profiter de la situation ou des plus faibles.

Difficile également de ne pas citer Haru, cette lapine naine qui dès sa première apparition sera qualifiée de fille facile puisqu'elle couche avec énormément de mâles. Cette mauvaise réputation lui vaut d'être isolée du club de jardinage dont elle fait partie. Mais malgré cette première impression, Haru sera au final bien plus que ça. Une fille en réalité vulnérable qui cherche juste à exister et à trouver une raison de vivre sachant que sa durée de vie est comptée au vu de sa nature faible d'herbivore. C'est lors de sa rencontre avec Legoshi qu'elle commencera à changer, devenant plus spontanée et amicale, bien qu'elle s'embrouillera aussi pas mal avec le loup qui lorsqu'elle fait un pas en avant vers lui aura tendance à en faire trois en arrière. Haru et Legoshi viennent donc se compléter et leur relation évoluera principalement dans la première partie du manga. Dans la seconde, la relation entre les deux personnage étant reléguée au second plan, Haru n'aura malheureusement plus le droit qu'à quelques caméos, si bien qu'on aura souvent tendance à l'oublier...

Enfin il reste Louis, un cerf membre du club de théâtre qui vise le titre de Beastar. Assez vaniteux, au contraire de la plupart des herbivores il ne craint pas les carnivores, n'hésitant pas à leur faire la leçon. Si lui aussi est amoureux d'Haru, il suivra finalement une autre voie qui l'amènera à découvrir d'autres facettes des carnivores qu'il méprise tant. Et s'il apprécie peu Legoshi au début de l'histoire, celui-ci lui rendra souvent service de manière indirecte, si bien que les deux finiront par développer une véritable bromance, rendant certains passages hilarants ! Si Louis sera un peu moins mis sur le devant de la scène comparé à Legoshi, il n'empêche qu'il saura lui aussi évoluer, apprenant à accepter son passé et à se libérer des démons qui l'entrave.

Il y aura bien sûr de nombreux autres personnages dont Gohin, un panda médecin qui se charge de veiller à la sécurité des habitants du Marché Noir et d'infliger une thérapie de choc aux carnivores qui s'abaisseraient à suivre leurs instincts de prédateurs. Juno, une louve qui rejoindra le club de théâtre et tombera éperdument amoureuse de Legoshi. Jack, un labrador et l'ami de Legoshi en toutes circonstances. Ou bien encore le gang des Tigres qui domine le Marché Noir et cherche à étendre son territoire.

C'est donc toute une galerie de personnages qui s'étend dans BEASTARS. Chacun saura évoluer dans différentes directions, parfois pour le mieux, parfois pour le pire. Certains élèves amis avec les herbivores n'hésiteront pourtant pas à se faire des sorties au Marché Noir par exemple, mais apprendront à revoir leur comportement au fil du manga. La plupart des personnages ne sont donc ni forcément bons ni forcément mauvais, comme dans la vraie vie au final. Chacun apparaîtra très humain, nous dévoilant ses meilleurs comme ses pires aspects, et c'est ce qui fera la réussite du casting de BEASTARS !

Une allégorie de la société

Au niveau du rythme, si l'histoire démarre de manière assez abrupte, elle finira par trouver son rythme de croisière assez rapidement, alternant dans la première partie entre scènes du quotidien, moments comiques, combats et séquences d'émotion, rendant la lecture des tomes assez rapide. Dans la seconde partie, la série conservera ce même mélange mais néanmoins cela fonctionnera moins bien. La lecture reste toujours aussi prenante mais c'est l'intrigue qui pèche, celle-ci avance peu et offre une avancée beaucoup moins soutenue, amenant ainsi des longueurs et rendant donc cette seconde partie beaucoup moins inoubliable que la première.

Le dessin pour sa part évolue rapidement. Le trait de l'auteure qui demeure assez rigide s'améliore au fil des tomes pour faire place à des traits plus légers et arrondis, rendant les chara designs anthropomorphiques beaucoup plus agréables à l'œil. Itagaki n'hésitera pas à utiliser le crayonné ou les coups de pinceau pour accentuer certaines scènes ou pour renforcer l'ambiance oppressante de ses planches. On le voit notamment sur les combats qui gagneront en intensité sur la fin, que ce soit au niveau du dessin et de la mise en scène ou tout simplement des techniques tirées des arts martiaux. Ainsi si certaines scènes pouvaient paraître un peu brouillonnes dans les débuts, ce ne sera plus le cas sur la fin.

Enfin difficile de ne pas citer les thématiques mises en avant dans l'œuvre. Certaines pourront aisément vous parler puisque BEASTARS se présente comme une allégorie de notre société. On le remarquera avec la thématique la plus évidente sur le rapport de force entre les carnivores, puissants et souvent très grands, et les herbivores, plus vulnérables et bien plus petits. Une thématique qui sera aussi retranscrite via la relation entre Legoshi et Haru où chacun devra faire des compromis et accepter les différences de l'autre afin que leur histoire puisse progresser, comme pour tous les couples finalement. Cela créera d'ailleurs pas mal de disputes assez chargées émotionnellement avec des envies parfois dévorantes, justifiant ainsi la méfiance qu'éprouvent les autres à l'égard de leur relation. Le thème du passage de l'adolescence à l'âge adulte sera l'autre thématique principale de l'œuvre qui sera développée à travers le personnage de Legoshi qui évoluera aussi bien physiquement que mentalement au fil de l'histoire. Toujours en retrait et évitant tout contact, le jeune loup apprendra malgré sa timidité à se sociabiliser, que ce soit dans l'institut avec ses camarades ou également dans le cercle de la société où il tentera de devenir un adulte accompli.

Une lecture dévorante !

Plus on s'élève et plus dure sera la chute. C'est ainsi que l'on pourrait qualifier BEASTARS, qui offre un premier arc maîtrisé aussi bien dans ses thématiques que dans sa narration, offrant même une conclusion satisfaisante. Néanmoins il continuera sur sa lancée avec un deuxième arc bien en deça où la trame comme l'évolution des personnages seront bien moins convaincants.

Malgré tout, BEASTARS reste à mon sens une œuvre à lire en raison des nombreux sujets presque tabous qu'elle aborde, de son intrigue absolument passionnante, et de sa grande galerie de personnages, et notamment Legoshi qui restera un héros fort et attachant que vous n'oublierez pas de sitôt !

Points Positifs	Points Négatifs
Une première partie maîtrisée de bout en bout	Une seconde partie moins convaincante
Des thématiques abordées avec justesse	Un antagoniste moins intéressant dans la seconde partie
Une grande galerie de personnages tous attachants